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Julien, le 22/9/2016

L'article est juste sur la précision sémantique entre les deux mot "public", soit la distinction entre l'institution publique et la vie publique. Mais pour ma part je trouve qu'il commet un oubli fondamental : celui des liens, de toute nature et de toute conséquence, qui s'établissent entre public-1 et public-2. Dans une société démocratique, ces liens sont supposés être régulés par le droit, décidé par les citoyens au moyen d'un système de représentation nationale. Si j'insulte autrui dans l'espace public-2, qui plus est devant témoin, je peux m'attendre à avoir des ennuis par les institutions mises en place dans public-1 (la police, le juge d'un tribunal).

La nature du lien entre public-1 et public-2 est donc d'ordre politique. C'est bien ce mot qui manque singulièrement à mes yeux dans l'article. Or quand la religion devient politique dans ce type de société, elle conteste les dispositions de droit de public-1 à l'égard de public-2. Au droit décidé par les Hommes au moyen d'un système dit "démocratique", elle entendrait in fine lui substituer progressivement un droit religieux. Et c'est là que les ennuis commencent...

Michel P., le 22/9/2016
@ Julien

Loin de moi de prétendre que l'État n'a jamais à intervenir dans ce qui relève du public-2. Relisons l'article en débat. Il y est écrit : "elle (la laïcité) ne concerne pas ce qui est public-2, dès lors que la tranquillité publique y est préservée, que les droits des uns n'y malmènent pas ceux des autres".C'est assez clair : dans le public-2, l'État doit faire respecter les lois qui régissent pour le bien de chacun nos rapports les uns avec les autres. Mais ce n'est pas alors au nom de la laïcité qu'il agit. Si une famille prétend privatiser une petite plage, il est normal que la puissance publique mette le holà, que les femmes du groupe s'y baignent en burkini ou en un deux-pièces microscopique, la laïcité n'a rien à voir là-dedans. Quant à savoir si le port d'un voile sur une tête féminine ou le déploiement d'une procession ont une signification simplement religieuse ou constituent dans le contexte historique une manifestation politique, c'est le sujet d'un grand débat où les opinions préalables de chacun vont s'affronter, et dont je ne suis pas sûr qu'il puisse être tranché de la même manière à propos de chacune des personnes en cause. Je le laisserai donc ouvert.

Julien, le 23/9/2016
@ Michel P.

Vous avez raison de rappeler que la société (public-2) n'est pas laïque au sens juridique du terme. Seul l'Etat, et la puissance publique en général (public-1), se doit de l'être au travers de ses représentants et de ses agents.

Cependant, ce n'est pas si simplement dichotomique. Tout d'abord, vous avez raison de rappeler qu'il n'est pas aisé de distinguer ce qui relève du seul comportement personnel de l'acte de revendication politique dans la manifestation des signes religieux dans public- 2.

Toutefois, le droit produit par public-1 révèle clairement que certaines conditions de manifestation de ces signes dans public-2 ont été considérées comme relevant d'un problème politique et nécessitaient une législation spécifique. La loi de 2004 sur les signes ostentatoires religieux à l'école en témoigne. Le Législateur a considéré comme un acte manifeste de contestation de son autorité et de ses principes le port de signes religieux ostentatoires dans ses écoles publiques. En effet, la loi de 1905 ne prévoyait aucune disposition en ce sens, mais seulement la neutralité des personnels (appartenant à l'espace public-1) et non celle des élèves (liés à l'espace public-2). Ce fut d'ailleurs l'argument des avocats des collégiennes dans l'affaire du "foulard de Creil". Actuellement, dans un contexte devenu très sensible sur ce sujet, certains responsables politiques voudraient étendre cette loi à l'université.

Ainsi, je veux juste dire qu'il y a porosité entre public-1 et public-2, sans jugement de valeur par ailleurs, et que cette porosité relève de questions politiques. La laïcité est devenue en France bien plus qu'une loi mais pour beaucoup un principe politique, une règle non écrite de vie collective, y compris a contrario pour certains activistes religieux qui entendent la remettre en cause. Certains diront que ce principe confine parfois à l'absurde. Les anglo-saxons comprennent difficilement la laïcité à la française et la raillent souvent. Mais les sociétés communautaristes anglo-saxonnes sont-elles plus enviables que la nôtre ? Je n'en suis pas si sûr.

Bien cordialement.

Michel P., le 23/9/2016
@ Julien

La loi de 2004 a en fait consacré une attitude plus ancienne, et ne doit pas être vue comme une révolution. On considérait depuis longtemps que dans l'école publique, tenue pour un espace public-1, la religion des usagers devait rester discrète, tout comme leurs convictions philosophiques et politiques. Quand j'étais lycéen, après 1944, certains proviseurs interdisaient aux élèves d'arborer à la boutonnière de leur veste un insigne marquant leur appartenance à la Jeunesse Étudiante Chrétienne, tandis que d'autres le toléraient en raison de sa toute petite taille, mais auraient interdit un insigne plus gros, identifiable à 3 mètres.