Je crois que Dieu vit avec moi
J’ai dix sept ans. J’ai demandé à recevoir la confirmation et je l’ai reçue il y a quelques mois, à la fin de ma première. J’ai beaucoup hésité avant
de faire cette démarche. Je m'étais éloigné de l'Eglise depuis la fin de mon catéchisme ; je me sentais très étranger. Il faut dire que j'avais fait une expérience
cuisante en 6ème. J'avais demandé à faire ma première communion avec un groupe d'enfants de l'aumônerie. Le jour de la célébration, des bancs étaient réservés pour les enfants au premier rang, d'autres
pour leurs parents juste derrière. Mes parents ont divorcé quand j'étais très jeune mais ils s'entendent bien. Ils ont pris place l'un à côté de l'autre, derrière moi
au second rang. Je n'avais jamais caché le divorce de mes parents et le prêtre le savait. Il s'approcha d'eux et leur demanda de quitter le second rang pour aller dans la foule ;
il leur précisa que leur conduite n'était pas un bon exemple pour les autres. Mes parents se sont exécutés sans rien dire pour ne pas faire de scandale dans l'église. Je sais qu'ils ont été profondément blessés
non seulement pour eux mais surtout pour moi : j'étais le seul du groupe qui n'avait pas ses parents à la place prévue pour eux. J'ai quand même fait ma première communion mais je me suis progressivement, par la suite,
éloigné de l'Eglise. Je ne voulais plus rien entendre de ce qu'elle disait ; si l'Eglise agit au nom de Dieu, comme elle le prétend, eh bien moi de ce Dieu là, je n'en veux pas.
C’est en m’éloignant de l'Eglise que je me suis aperçu que Dieu comptait pour moi, que j’avais besoin de lui. Je crois que Dieu vit avec moi.
Dans les moments de cafard, je fais appel à lui. Les jours où je trouve que ce qui m’arrive est tellement bien, je me sens dépassé et je me dis que
c’est un cadeau de Dieu. Il est pour moi une grande force, dans la joie comme dans les difficultés. Je crois que Dieu donne mais qu’il ne le fait pas sans moi.
C’est quelque chose que l’on fait ensemble. Il me donne sa présence. Je crois en sa présence. Je veux continuer à vivre avec lui. L'Evangile m'intéresse même si parfois je ne le comprends
pas. Quand Jésus dit qu'il n'est pas venu pour nous juger mais pour nous guérir, cela me pousse à aller vers lui. Mais comment continuer à connaître
l'Evangile et Jésus-Christ sans passer par l'Eglise catholique ? J'ai entendu parler de la foi par mes parents qui sont catholiques ; je suis allé au catéchisme dans l'Eglise catholique ;
les quelques amis croyants que j'ai appartiennent à l'Eglise catholique. Je ne connais pas d'autre lieu pour pouvoir entendre parler de Dieu et de Jésus-Christ. C'est pourquoi, j'ai voulu
recevoir la confirmation dans la seule Eglise que je connaisse.
Je crois que la parole d’un prêtre n’est pas nécessairement Parole de Dieu
Je suis élève depuis la sixième dans un grand collège - lycée catholique sous contrat. On m'avait proposé d'aller à l'aumônerie mais, depuis la cinquième, j'avais refusé.
Pour être confirmé, il fallait participer aux réunions de préparation. J'ai donc réintégré l'aumônerie en première.
Le prêtre que j'y ai trouvé n'était plus le même que le jeune aumônier que j'avais en sixième. C'était un homme de 75 ans environ, qui avait été dans l'armée pendant longtemps.
Il n'admettait pas que l'on puisse discuter ce qu'il disait.
Dailleurs nous n'en avions pas souvent l'occasion car la moitié du temps c'est lui qui parlait et l'autre moitié, il nous demandait
de rester devant le saint sacrement pendant une demi-heure chaque semaine.
Je ne comprends pas du tout ces rites et je ne pense pas devoir faire cela pour me rapprocher de Dieu. J’ai pourtant continué : j’avais compris qu’il ne faut pas
confondre le prêtre avec Dieu. Cet aumônier a sûrement été élevé dans des rites qui le rassurent,
comme l’exposition du Saint Sacrement. Pour moi, cela ne signifie rien!
Mais encore une fois, cela m’a "confirmé" qu'il ne fallait pas confondre la parole d’un prêtre avec la parole de Dieu.
Je crois que les chrétiens ont à lutter contre le racisme
Un jour l'aumônier a organisé une conférence sur l’islam à laquelle tous les élèves étaient invités. Des musulmans sont venus.
Le conférencier savait-il qu'il y avait des musulmans qui étaient présents ? Je l'ignore. Mais, en parlant d’événements récents,
il a dit que l’islam et les musulmans sont naturellement violents. Il a prétendu que cette religion a toujours été portée à faire la guerre
pour s’imposer et prendre le pouvoir. Des élèves musulmans ont tellement été choqués qu’ils ont écrit au proviseur pour dénoncer ces propos islamophobes.
Plusieurs d'entre nous ont protesté en faisant remarquer que l’Eglise catholique avait, au cours des siècles, elle aussi cherché à prendre le pouvoir,
qu’elle n’avait pas hésité à utiliser des armes et à tuer pour le faire. Mais il a justifié l'Eglise. Nous avons vu qu’il était inutile d’insister.
Je crois qu’être confirmé c’est s’engager à lutter contre toute forme de racisme, en particulier les propos contre les
musulmans qu’on entend souvent aujourd’hui. Je crois qu'être confirmé c'est refuser d'être solidaire des propos racistes de certains chrétiens.
Je crois que c’est à chacun de se situer par rapport aux lois de l’Eglise
Pour moi, demander la confirmation c’était décider de faire partie de l’Eglise. Mais je ne crois pas pour autant qu’il faille être sans critiques à son égard ou
prendre au pied de la lettre tout ce qu’elle dit. J’accepte que le pape et les évêques fixent des règles, par exemple pour le mariage ou l’avortement. C’est bien de
dire que lorsqu’on aime quelqu’un et qu’on se marie, c’est pour toujours ; ou bien que la vie humaine est importante et qu’on ne peut pas en faire n’importe quoi. Mais si,
dans un couple, la vie devient intenable ou si une femme est contrainte d’avorter, je crois qu’il y a plus important que les lois de l’Eglise. Je ne crois pas
que Dieu préfère la souffrance dans un couple à un divorce. C’est à chacun de se situer par rapport aux lois de l’Eglise, comme il peut en
fonction de sa situation et des difficultés de ce qu’il vit. Je trouve qu’il n’est pas normal que l’Eglise empêche de communier ceux qui ne respectent pas les lois
qu’elle donne. Mais là aussi, c’est à chacun de décider s’il communiera ou non ; si son âme est en paix ou non.
Je crois que la messe est importante bien que je ne pratique pas régulièrement
Je n’allais plus à la messe le dimanche avant ma confirmation ; je n’y vais pas très souvent depuis. Quand j’étais plus jeune, j’y allais parce que j’étais enfant
de chœur et que je me sentais attendu pour faire quelque chose d’utile et de précis. Aujourd’hui, je ne me sens plus attendu ; si je l’étais, je crois que j’irais.
Par exemple, je joue de la guitare, si on me disait qu’on m’attend pour jouer un morceau qui peut aider à la prière, j’irais aussi souvent qu’on me le demanderait,
du moins il me semble. Je ne pense pas à aller à la messe chaque dimanche. Quand j’y vais, je suis dans un état d’esprit différent de la vie de tous les jours, je ne saurais
pas bien le définir mais je crois que cela vient de Dieu. La messe demeure pour moi un moment important, je prie, j’écoute les lectures et
elles m’invitent à réfléchir. Il y a des paroles de Jésus avec lesquelles je ne suis pas d’accord ; je me dis que c’est peut-être mon réflexe humain qui résiste et
cela m’oblige à me poser des questions. Ces lectures sont les plus importantes avec la communion.
Je crois et je désire que l’Evangile façonne mon esprit
En demandant la confirmation j’ai accepté de faire partie de l’Eglise catholique bien que je me sente toujours étranger voire hostile à certaines positions
de ses membres, prêtres ou laïcs. Je sais, par exemple, que 62% des jeunes catholiques ont voté à l’extrême droite. Pour moi, c'est absurde ! Qu’ont-ils compris à la foi
et à ce qu’ils entendent à la messe ? Ils entendent « aimez-vous les uns les autres » et ils traduisent qu’il est normal d’expulser des gens dont le seul tort est de
ne pas être nés en France. Certains disent, pour se justifier, qu’il ne faut pas tout mélanger : de même qu’il ne faut pas mêler les sciences et la religion, il ne faut
pas confondre la religion et la politique. L’expulsion des étrangers serait–il un mal nécessaire ? Devrait-on passer par là si on veut vivre en paix ? A mon avis,
si la religion ne t’aide pas à vivre au jour le jour, si elle ne te pousse pas à faire un monde où tous ont leur place, elle n’est que du vent. Pour moi être confirmé,
c’est désirer que l’Evangile façonne mon esprit et que Dieu ressorte dans toute ma vie.
Loïc
Ecrire ou lire les commentaires