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Noël - Messe de la nuit 25 décembre

Evangile de Jésus-Christ selon saint Luc
Lc 2, 1-14

En ces jours-là, parut un édit de l'empereur Auguste, ordonnant de recenser toute la terre - ce premier recensement eut lieu lorsque Quirinius était gouverneur de Syrie. - Et chacun allait se faire inscrire dans sa ville d'origine. Joseph, lui aussi, quitta la ville de Nazareth en Galilée, pour monter en Judée, à la ville de David appelée Bethléem, car il était de la maison et de la descendance de David. Il venait se faire inscrire avec Marie, son épouse, qui était enceinte. Or, pendant qu'ils étaient là, arrivèrent les jours où elle devait enfanter. Et elle mit au monde son fils premier-né ; elle l'emmaillota et le coucha dans une mangeoire, car il n'y avait pas de place pour eux dans la salle commune.

Dans les environs se trouvaient des bergers qui passaient la nuit dans les champs pour garder leurs troupeaux. L'ange du Seigneur s'approcha, et la gloire du Seigneur les enveloppa de sa lumière. Ils furent saisis d'une grande crainte, mais l'ange leur dit: «Ne craignez pas, car voici que je viens vous annoncer une bonne nouvelle, une grande joie pour tout le peuple : Aujourd'hui vous est né un Sauveur, dans la ville de David. Il est le Messie, le Seigneur. Et voilà le signe qui vous est donné : vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire. » Et soudain, il y eut avec l'ange une troupe céleste innombrable, qui louait Dieu en disant : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes qu'il aime. »

« Avec nous ! »
Michel Jondot

Enfance !
Christine Fontaine

Quand le coeur s'éveille
Christine Fontaine


« Avec nous ! »


Au coude-à-coude humain

Vous est-il arrivé d’être seul un soir de Noël ? Lorsque les obligations de la vie nous tiennent éloignés de nos proches, on s’arrange, même si l’on n’est pas spécialement croyant, pour trouver des amis avec qui faire la fête ou avec qui partager nourriture et idées. Quel drame pour ceux qui vivront la soirée ou la journée dans la solitude absolue. La nuit du 24 décembre est, paraît-il, celle où l’on compte le plus de suicides tant il est inconcevable de vivre la fête sans un coude-à-coude humain. On s’en rend compte dans notre monde sécularisé : la rencontre d’autrui, dans la majorité des pays d’ancienne chrétienté, est peut-être plus importante que la plus solennelle célébration dans la plus belle cathédrale de France ou de la chrétienté d’hier. Qui sait s’il ne faut pas s’en réjouir ? Ne peut-on prétendre que le mystère de Noël est une fête plus humaine que religieuse ? A moins qu’elle ne puisse être vraiment religieuse si elle n’est pas l’occasion d’une authentique et fraternelle convivialité. On serait tenté de le penser en lisant ce texte de Luc.

Le chant du monde

Les quelques lignes qui nous rapportent la naissance de Jésus ont la dimension d’un poème qui chante, sinon le cosmos, du moins les liens qui unissent entre eux les éléments de l’univers. Connaissez-vous l’Art poétique de Paul Claudel ? A le lire, on n’est pas étonné qu’il se soit converti un jour de Noël. L’auteur s’aperçoit qu’une réalité, lorsqu’elle voit le jour, entre en relation avec ce qui l’entoure. Rien ne tient en soi-même et n’a de consistance que dans les « rapports qui sont entre les choses ». La main ne naît pas sans son ombre sur le mur. Tout ce qui naît s’articule sur ce qui existe comme, dans le corps humain, le cœur s’articule sur le poumon. Naître revient donc à connaître : « naître avec ». La proposition donne sens à l’univers : le mouvement fait passer d’une réalité à une autre. Ainsi va la vie.

Cette vision du poète permet d’entendre ce récit de Luc nous rapportant la naissance d’un enfant. Le bébé n’apparaît pas dans le vide ni dans un lieu mythique mais en relation « avec » le monde animal : le cœur du texte désigne le lieu où son corps est déposé, l’auge où viennent se nourrir l’âne ou le boeuf. Le monde humain n’est pas loin ; des voyageurs sont dans une hôtellerie noire de monde, à l’intérieur d’un ensemble géographique où les villes vont « avec » les champs : « Joseph quitta la ville de Nazareth, en Galilée, pour monter en Judée, à la ville de David appelée Bethléem ». « Dans les environs se trouvaient des bergers qui passaient la nuit dans les champs. »

Le monde humain est loin d’être indifférencié. Joseph, Marie et l’enfant sont au milieu du peuple qui va se faire recenser. Ceux-ci sont mis en mouvement par les plus hautes autorités politiques : un édit de l’empereur Auguste... alors que Quirinus était gouverneur ». Le peuple où Marie et Joseph sont mêlés n’est pas séparé de ces hommes considérés comme des indésirables : les bergers dans les champs ont mauvaise réputation. On se méfie toujours de ceux qui vivent sur les marges. Le texte, pourtant, ne les sépare pas de la scène. Jésus « naît avec » eux ; Jésus, du fait de naître, si l’on reste dans la cohérence de Claudel, les connaît.

Emmanuel : Le mystère de la parole

Luc ne se contente pas – et ce n’est pas par hasard – de mentionner les êtres qui composent l’environnement immédiat. « La terre tout entière » est concernée puisqu’elle est tout entière recensée. Cette terre où Marie met Jésus au monde va « avec » les hauteurs du ciel. On est heureux, chaque 24 décembre, de se rappeler le chant « des anges dans nos campagnes ». Belle est la joie des chrétiens lorsqu’ils entonnent tous ensemble « Gloria in excelsis Deo ». Naître à la parole humaine revient en effet à connaître le langage de Dieu.

Saint Jean, lorsqu’il commence son Evangile est plus sobre que Luc, mais il signale dès les premières lignes de son livre, le mystère de Noël. « Au Commencement était le Verbe et le Verbe était Dieu....Il est venu parmi les siens ». Naître à la parole humaine comme Jésus qui reçoit les mots de tendresse que chuchotent à son oreille un homme et une femme de Galilée c’est, pour l’humanité qui l’accueille, connaître le langage de Dieu. La présence des anges évoque cette communication entre les deux mondes. L’enfant qui naît connaît le monde des hommes et ceux-ci, avec lui, connaissent le monde du Père. Le seul mot d’Isaïe suffit pour dire le mystère : « Emmanuel : Dieu avec nous ». Avec nous !

Que ce Noël purifie notre regard. Ne cherchons pas Dieu dans un ciel qui nous paraîtra bientôt fermé. Ne forgeons pas un paradis de pacotille en inventant des costumes ou en construisant des célébrations ostentatoires. Réunissons-nous, écoutons-nous et chantons. Le mystère de Dieu passe par nos lèvres. Ouvrons les yeux les uns sur les autres ; en nous connaissant nous Le connaîtrons, Lui !

Certes, notre humanité est souffrante, mais ne la méprisons pas. Elle se déchire alors qu’elle est faite pour naître et connaître sans cesse. Ne rêvons pas mais ouvrons les yeux et ouvrons les chemins qui nous conduisent les uns vers les autres. Dénonçons le malheur des peuples qui ne » veulent se connaître que pour s’enrichir au détriment les uns des autres au risque d’étouffer la vie qui peut naître. L’enfant qui vient au monde aujourd’hui à Bethléem, un jour connaîtra la mort mais ce sera pour montrer que par-delà tous les malheurs possibles on est appelé sans cesse à naître et à renaître.

Michel Jondot



Peinture de Soeur Boniface


Enfance !

L’enfance qui est derrière

« Une fois sortis de l’enfance il faut très longtemps pour y rentrer,
comme tout au long de la nuit
on retrouve une autre aurore. » (Georges Bernanos).
Aujourd’hui, c’est Noël.
On prétend que c’est la fête des enfants
et ce n’est pas faux
puisqu’en ce jour on aime à leur faire des cadeaux.
Mais Noël c’est d’abord la fête des grands,
le jour où les grands – ceux qui sont depuis longtemps sortis de l’enfance -
sont invités à y rentrer.
Car l’enfance n’est pas d’abord derrière nous.
Elle est devant, toujours d’abord devant.
Ou plutôt l’enfance qui est derrière – si elle fut heureuse - est comme une étoile
qui nous guide à travers les nuits de nos existences.

Notre enfance, celle qui est derrière,
est le temps où la vie s’offrait à nous sous forme d’espérance
sans même que nous en prenions conscience.
L’enfance est portée par l’espérance du premier pas à faire,
de la première parole distincte à prononcer,
de la première lettre tracée en tremblant, de la première lecture.
L’enfance, c’est le temps des premières fois ;
Ce qui nous semblait hors d’atteinte devient possible.
L’enfance, c’est le temps où tout est possible…
jusqu’au jour où l’on apprend que… non…
tout n’est pas possible…
et c’est alors qu’on fait ses premiers pas chez les grands !
L’enfance commence à s’éloigner
quand on se heurte pour la première fois
à une difficulté que l’on espérait pouvoir vaincre
- comme nous l’avions toujours fait -
mais qui se révèle insurmontable.

L’enfance qui est devant

Dans l’enfance on cueille l’espérance comme on cueille la vie.
Mais c’est l’enfance de derrière nous,
celle qu’il nous faut quitter,
pour devenir enfants de Dieu, car nous le sommes !
Et c’est cette naissance que nous fêtons à Noël.
Aujourd’hui Dieu se fait enfant des hommes
pour qu’à notre tour nous devenions enfants de Dieu.
Il est temps aujourd’hui de croire que notre enfance
- celle que Dieu nous propose en vivant parmi nous -
est non pas derrière mais devant.

« Une fois sortis de l’enfance il faut très longtemps pour y rentrer,
comme tout au long de la nuit
on retrouve une autre aurore. » (Georges Bernanos)
Marie et Joseph ont supportés les fatigues d’un long voyage
à travers la Galilée et la Judée ;
ils n’ont pas trouvé de place dans l’hôtellerie ;
c’est au fond d’une grotte, au plus noir et au plus froid de la nuit,
que Marie mit au monde son fils, premier né.
Dans l’enfance on croit facile d’espérer.
Marie et Joseph ont dû apprendre à mettre un pied devant l’autre,
pour ne pas désespérer.
Combien de nuits nous faut-il traverser,
combien de chemins pierreux et tortueux nous faut-il parcourir
combien de combats nous faut-il mener
pour devenir capables d’espérer contre toute espérance
que Dieu ne nous a pas abandonné sur les routes de la vie
et qu’il est bien l’Emmanuel, Dieu-parmi-nous !


L’enfance dès aujourd’hui

Aujourd’hui c’est Noël pour les petits
pour qui il est comme naturel d’espérer
mais c’est aussi Noël pour les grands,
ceux qui sont tentés de désespérer d’eux-mêmes, de leur existence
ou du monde dans lequel nous vivons.
Aujourd’hui Dieu nous invite à vivre dans l’espérance
des enfants de Dieu,
celle qui est le fruit d’un combat contre toute la vieillesse du monde.
C’est aujourd’hui le moment que Dieu nous propose
pour nous sortir de la nuit et retrouver une autre aurore.
C’est aujourd’hui que Dieu nous supplie de croire qu’il vit au milieu de nous.
Sortis de l’enfance, nous disions : « Dieu m’a abandonné,
le Seigneur m’a oublié ! »
Mais en ce jour de Noël Dieu nous répond :
« Une femme oublie-t-elle l’enfant qu’elle nourrit ?
Cesse-t-elle d’avoir pitié du fruit de ses entailles ?
Même si celles-là oubliaient,
moi je ne t’oublierai jamais ! » (Isaïe 49)
« Une fois sortis de l’enfance il faut très longtemps pour y rentrer,
comme tout au long de la nuit
on retrouve une autre aurore ! »
L’autre aurore que Dieu nous propose, c’est maintenant
pour les petits comme pour les grands !


Christine Fontaine


Quand le coeur s'éveille


Dieu aime les hommes

"Gloria in excelsis Deo"
Dieu a tant aimé le monde qu'il a envoyé son Fils.
Noël!
Le jour où les chrétiens se rappellent que Dieu aime les hommes!

Chacun peut faire toutes les variations possibles et imaginables sur ce thème, dans tous les registres de la foi.
L'Eglise a élaboré les dogmes pour le dire; des hommes et des femmes, tout au cours de l'histoire, ont multiplié les discours.

Gloire à Dieu dans les hauteurs : notre Dieu montre qu'Il nous aime. Voilà la merveille de Noël.

Mais cette merveille là, bien avant la nuit d'il y a deux mille ans, des hommes la savait.
Dieu n'a pas attendu Noël pour nous dire son amour; ni le Noël de maintenant, ni le premier, celui de Bethléem.

Les prophètes, les rois en Israël, les mystiques, les sages et tout le peuple jusqu'au plus petit de ses enfants se le répétaient depuis la nuit des temps. Dieu aime les hommes, c'est vrai. C'est vrai depuis toujours; mais ce n'est peut-être pas cela le vrai miracle de Noël.

Un coeur d'homme qui s'éveille

Et pourtant, en cette nuit d'il y a deux mille ans, il y a eu de la nouveauté sous le ciel étoilé de Bethléem.

En ce jour, Dieu a adressé aux hommes une parole toute neuve comme une enfance,
une parole jamais dite et que nous n'avons peut-être pas encore commencée d'entendre.

Au fond de la campagne de Judée, Dieu a vu et il s'est émerveillé.
Dieu a vu le coeur d'un homme - son Fils - s'éveiller à la vie
et la joie de Dieu a envahi le ciel et la terre.

Joie au ciel, paix sur la terre : un coeur d'homme désormais va montrer ce que c'est que d'aimer.
Dieu va savoir ce que c'est que d'être aimé en vérité par un homme.

Le mystère de Noël n'est pas d'abord que Dieu aime les hommes.
Le mystère, le miracle, la merveille de Noël, c'est qu'il n'y a rien de plus important pour Dieu qu'un coeur d'homme quand il se met à aimer.

Notre Dieu, le très Grand dans les Hauteurs, le Tout-Puissant, le Dieu au plus haut des cieux, attache tellement d'importance à l'homme qu'Il invente un homme, son Fils, avec un coeur pour l'aimer, qu'il invite les hommes à apprendre qu'ils ont un coeur capable d'amour.

Nous avons un coeur capable d'aimer, voilà ce que Dieu veut nous apprendre; et il faut vraiment être Dieu pour prétendre que les hommes vont se mettre à y croire.

Dans la poitrine de Jésus, un coeur se met à battre,
un coeur qui saura aimer charnellement.
Il saura aimer le monde dont il admirera les saisons.
Il saura s'émerveiller devant le soleil couchant comme devant le visage d'un enfant.
Un coeur s'ouvrira à tous les miséreux, s'attachera à des amis, Madeleine, Marthe et Lazare, Pierre, Jacques et Jean.
Un coeur d'homme saura aimer aux dimensions de Dieu, car cet homme est Fils de Dieu.
Un coeur va s'ouvrir à l'infini de Dieu!

Noël est le jour où Dieu s'émerveille devant le coeur de l'homme,
c'est le jour où il nous montre ce que peut un coeur d'homme.
Depuis Jésus, nous le savons, le coeur de l'homme est capable d'un amour plus grand que l'homme, d'un amour vaste comme Dieu.

Notre coeur s'éveille

Ce soir, et demain, et tous les jours, notre coeur se réveille;
nous nous rappelons que nous avons des amis,
nous désirons que nos maisons se remplissent de l'affection de nos proches,
nous souhaitons nous donner de la joie,
nous ne supportons pas d'être séparés de ceux que nous aimons.

C'est Noël parce que notre coeur s'éveille.
C'est Noël si notre coeur n'est pas borné.
C'est un tel miracle que Dieu lui-même s'en émerveille et en tire sa gloire!

Gloire à Dieu dans les hauteurs
et paix sur la terre à tous les hommes
parce qu'ils ont un coeur taillé à la mesure du Fils de l'Homme,
à la mesure de Dieu!

Christine Fontaine
Peinture de soeur Boniface