Dieu qui est partout ne nous quitte jamais.
Cependant il semble parfois absent.
Et si nous ne le connaissons pas bien, nous ne comprenons pas qu’il peut être plus proche de nous lorsqu’il est absent que lorsqu’il est présent.
Il y a deux sortes d’absences de Dieu. L’une nous condamne, l’autre nous sanctifie.
Dans le premier cas, il est présent, mais on se prive de lui pour une idole.
Dans le second cas, il est présent, et sa présence est affirmée et honorée par l’absence de tout le reste. Bien qu’invisible, il est plus proche de nous que nous ne sommes nous-mêmes.
Quiconque cherche à l’attraper et à le garder le perd. Il est comme le vent qui souffle où il veut.
Vous qui l’aimez devez l’aimer comme venant d’une destination inconnue et repartant vers un lieu que vous ignorez.
Dieu s’approche de nos esprits en s’en éloignant. Nous ne pourrons jamais le connaître pleinement si nous le considérons comme un objet de capture, qui peut être enfermé dans l’enceinte de nos propres idées.
Tout homme devient l’image du Dieu qu’il adore.
Celui qui adore une chose morte devient une chose morte.
Celui qui aime la corruption pourrit.
Celui qui aime les choses périssables vit dans la crainte de les voir périr.
Le contemplatif qui cherche à emprisonner Dieu dans son cœur, devient prisonnier dans ses étroites limites et le Seigneur s’évade et le laisse à sa prison, à sa réclusion, à son recueillement mort.
Celui qui laisse sa liberté au Seigneur l’adore et reçoit la liberté des enfants de Dieu.
Il aime comme aime le Seigneur et sera emporté, captif de l’invisible liberté divine.
Thomas Merton
Extrait de Nul n’est une île, Seuil 1956
Peinture de Vasilij Kandins