L'aventure de la foi
« Yahvé dit à Abram : Quitte ton pays et la maison de ton père pour le pays que je t'indiquerai. » Par ces quelques lignes, au début du livre de la Genèse - la Bible nous raconte le premier Exode de l'histoire sainte. C'est en effet bien d'un Exode dont il s'agit : une sortie de soi-même autant que de son pays, une marche dont on ne sait pas encore où elle va mais où on est assuré d'aller avec « l'Autre ». En effet, « Yahvé » dans la Bible désigne précisément « l'Autre » de l'humanité, tellement Autre qu'il est même interdit de prononcer son Nom.
Quel privilège exorbitant pour Abram que d'être choisi ainsi parmi tous les habitants de la terre ! Dans nos esprits toujours prompts à aimer le sacrifice - quoi qu'on en dise - on pourrait comprendre que Dieu exige quelque dédommagement. Or rien de tel. Certes, il est demandé à Abram de quitter son pays et la maison de son père mais il ne s'agit pas de le mettre dans la solitude ni la misère pour autant. Abram part sans savoir où il va mais il ne part pas seul. Il emmène avec lui sa femme Saraï et son neveu Lot. Puisque le couple est stérile, Lot représente leur seule descendance. Il emporte aussi tout l'avoir qu'ils avaient amassé et le personnel qu'ils avaient acquis à Haran, autrement dit tous leurs biens.
Il n'est rien demandé d'autre à Abram que de s'aventurer sur un chemin qu'il ne connaît pas mais avec l'assurance que Dieu le conduira. Yahvé n'exige rien, il promet : « Je bénirai ceux qui te béniront, Je maudirai ceux qui te mépriseront. » Et encore : « Je ferai de toi un grand peuple, je te bénirai, je magnifierai ton nom ; sois une bénédiction ! ». Cette marche où l'un et l'Autre sont liés est bénédiction pour tous : « En toi se béniront tous les clans de la terre. » Ils se féliciteront tous de cette aventure singulière sans qu'Abraham n'ait même à le chercher.
Cette aventure est celle de la foi, celle d'Abram en Yahvé mais aussi celle de Yahvé en Abram. On pourrait dire que l'un mise sur l'Autre comme l'Autre mise sur l'un. En effet, sans l'assurance que l'Autre continuera à lui parler, Abram ne saurait plus où aller et ne pourrait donc pas partir. Mais sans l'écoute d'Abram, Yahvé n'aurait plus de prise sur l'histoire humaine dans ce qu'elle a de plus singulier.
Ce récit, écrit au livre de la Genèse, figure - dans l'aventure d'Abraham - notre propre Genèse. Chacun de nous y découvre la source bien présente mais cachée de sa vie en ce qu'elle a d'unique. Cette source dont Jean de la Croix disait : « Je la connais la source elle coule, elle court mais c'est de nuit ! » En ce « lieu » Dieu me parle : qu'est-ce à dire puisque je ne l'entends pas ? S'il ne s'agissait pas d'éclairer le mystère qui m'habite, j'aurais bien raison de réagir ainsi. Mais il est question ici d'une source déjà connue et toujours encore cachée. Ou bien encore d'une « voix de fin silence » ou d'une « brise légère » comme pour Elie, le prophète (1).
À la source de ma propre vie, dans ce qu'elle a d'unique au monde, Dieu parle et il me dit : « Quitte ton pays et la maison de ton père. » Il me propose une aventure où l'unique que je suis est lié à Lui, le tout-Autre, où ce qui me rend unique est précisément de n'être pas « comme toute le monde » mais lié à l'Autre. Dans cette aventure « je » fais corps avec l'Autre. Alors je ne suis plus entravé dans ce qui m'enferme sur moi-même, dans les images que je me fais de moi. Je m'échappe à moi-même pour me recevoir sans cesse de l'Autre. Source jaillissante où l'on se reçoit l'un de l'Autre, où l'on se donne l'un à l'Autre sans fin ! Source de libération et de bénédiction pour tous ! En effet, ma simple présence dit à chacun, sans que j'aie même à le formuler : « Tu n'es pas pour moi 'comme tout le monde'. Tu es unique puisque toi aussi tu fais corps avec l'Autre. Tu t'échappes à toi-même. Quoi que tu cherches à me prouver ou à te prouver, dans ce que tu as de plus singulier, tu es autre et tu le seras toujours. Autre que tous les autres, autre que ce que tu penses de toi, tu es celui que j'appelle simplement par son nom et devant le mystère de qui je m'incline. »
Cette aventure où l'un n'est pas sans l'Autre ni l'autre sans l'Un est celle, à en croire le livre de la Genèse, où s'engendre toute vie humaine. Elle n'a rien à voir avec une morale du sacrifice ni avec un altruisme facile. Cette aventure est celle de la vie tout simplement, là où elle coule de source.
Le combat de Dieu
Mais le livre de la Genèse, juste avant l'histoire d'Abraham, décrit aussi Babel. « Tout le monde se servait alors d'une même langue et des mêmes mots. » Tous pouvaient s'entendre et se comprendre. Et ils profitèrent de cette entente pour mettre leurs efforts et leurs techniques en commun : Ils se dirent l'un à l'autre : Allons ! Faisons-nous des briques et cuisons-les au feu. » Ils décidèrent, d'un commun accord de construire une ville « phare ». La Bible dit : « avec une tour dont le sommet pénètre les cieux. » Ce projet réunissait tous les hommes de la terre ; il s'agissait donc de fournir un modèle à toutes les générations futures. Se servir d'une même langue pour pouvoir tous se comprendre sans problèmes, profiter de cette compréhension mutuelle pour mettre les capacités techniques et la force de travail en commun, bâtir une ville c'est-à-dire un lieu où il fait bon vivre ensemble, tel était le modèle de société qu'ils voulaient léguer à leur descendance.
L'humanité semblait alors bien partie. On aurait pu croire que Yahvé s'en serait réjoui. « Or Yahvé descend voir la ville et la tour que les hommes avaient bâtie » et il se fâche. Il prétend que si les hommes commencent ainsi « aucun dessein ne sera désormais irréalisable pour eux ». Autrement dit, Il voit que ce modèle risque de marcher et qu'il est temps pour lui d'intervenir. Alors il descend, il se mêle à la situation et il casse tout. Il « confond leur langage pour qu'ils ne s'entendent plus les uns les autres... il les disperse sur toute la terre et ils cessèrent de bâtir la ville. » Yahvé intervient vigoureusement pour casser le modèle d'une société où tous les hommes ne font qu'un sans l'Autre. Aux sources de l'humanité, en chacun comme en tous, cette tendance à se complaire dans le semblable, le même, le déjà connu, existe aussi. On n'aime pas ce qui nous dérange. Mais ce n'est la plupart du temps qu'une tendance car l'Autre intervient toujours et crée un cataclysme ! Il met de la confusion dans notre langage pour qu'on ne s'entende plus et il nous disperse. Il casse cette humanité bétonnée en elle-même. Lorsque cette tornade passe sur nous et nous emporte, nous crions souvent à l'injustice et nous gémissons sous les coups du ciel. Nous ne comprenons pas ces coups du sort qui nous paraissent détruire la paix en nous et entre nous. Cependant, à en croire le livre de la Genèse, cette vie sans l'Autre, et donc sans autres puisque chacun est identique, ressemble à la mort. Elle empêche toute aventure. Si, en premier lieu, elle peut nous sembler bonne, elle nous plonge dans la tristesse et dans l'ennui. Elle nous fait perdre le goût de vivre.
Le combat avec l'Ange
Cette vie où l'un et l'Autre sont liés au cœur de chacun, cette vie qui coule de source et se répand sur tous sans qu'il y ait à le chercher ne va pas sans un combat qui la précède. Lorsque Babel - c'est-à dire ma propre tour d'ivoire - est ébranlée, je suis tenté de prendre le bien pour le mal et le mal pour le bien. Non pas un bien qui serait de l'ordre de la morale mais ce qui, concrètement, me fait du bien ou du mal, me réjouit ou m'afflige. En effet le combat se livre dans la chair de chacun. Les coups que je reçois me blessent physiquement, charnellement. Je ne perçois pas spontanément qu'il m'est profitable de passer par là. Il s'agit d'un corps à corps avec l'Ange, avec l'Autre.
Nous risquons tous de prendre la vie pour la mort et la mort pour la vie. La chance que nous avons d'être blessés par l'Autre - on appelle cela un coup de la vie - ou par les autres quand ils sont vraiment autres et qu'ils nous dérangent, cette chance-là va nous apparaître souvent comme un malheur. Entendons-nous bien : tant qu'on peut réduire l'autre à soi-même, il ne nous gêne pas. Et pour échapper aux blessures, nous aurons tendance, lui comme moi, à nier ce que nous avons de différent. Cette tentation de préférer le même à l'Autre joue partout. Nous avons tous tendance au totalitarisme. Nous avons tous tendance à chercher une assurance en demeurant à l'abri entre nous.
Cette tendance, par exemple, pousse les uns à faire une enquête sur l'identité nationale plutôt que sur sa diversité. Elle pousse les autres à craindre l'islam depuis qu'il s'implante « chez nous ». Ou bien encore à prétendre - si l'on se veut ouvert - qu'on n'a rien à craindre des musulmans : ils ont « le même » Dieu que nous, ils croient et pensent « comme nous ». On peut être poussé à mettre l'étranger à la porte ou à lui imposer notre culture en oubliant qu'il vient d'ailleurs. On peut aimer porter un uniforme comme les adolescents. On peut aimer vivre dans un couple ou une famille de manière fusionnelle au moins jusqu'au moment où on y étouffe. On peut aussi être prisonnier de soi en oubliant que si chacun est unique nul n'est seul au monde. Nous pourrions multiplier presque sans fin les exemples en énumérant les tentations au totalitarisme des Églises et des religions, des États et des Nations et même aujourd'hui du monde entier : c'est le risque d'une certaine forme de « mondialisation ». Méfions-nous de la paix quand elle semble aller de soi ! À en croire la Bible, quand la paix est réelle, elle est toujours le fruit d'un combat.
Lorsque l'humanité pense qu'elle a intérêt à demeurer unie dans une pensée unique, une parole unique, une culture unique ou... une religion unique, Dieu divise. On pourrait dire, si l'on osait quand il s'agit de Dieu, qu'il est l'Empêcheur de tourner en rond. Il plonge l'humanité dans la confusion mais ce faisant il la prend au piège, car en « altérant » ainsi l'humanité c'est bien la confusion qu'Il confond ! En opérant la division, il permet que « ça diffère » entre nous, il crée un appel d'air. La Bible nous dit que Dieu met du souffle dans nos vies. N’est-ce pas dans cette cohérence-là que Jésus dit : « Je ne suis pas venu apporter sur terre la paix mais la division. » ?
Le combat de la foi
« Mais alors qui peut être sauvé ? » demandent les apôtres, dans l'Évangile, à Jésus. Et sa réponse est on ne peut plus nette : « Aux hommes, c'est impossible... » Il est effectivement impossible de se sauver de soi-même par soi-même. On ne peut que s'enliser davantage. Tous nos efforts pour sortir de nous-mêmes par nos propres forces seront toujours vains. Mais, pour les chrétiens, cette impossibilité est leur chance. En effet Jésus ajoute : « Aux hommes c'est impossible mais pas à Dieu car rien n'est impossible à Dieu. » Il nous invite ainsi à lâcher prise. Il nous demande de ne plus nous attacher à nos pauvres péchés et à nos petites vertus : elles ne peuvent représenter, en négatif ou en positif, que des images de nous-même... on pourrait presque dire des idoles. Mais elles ne nous représentent pas : nous sommes autres, toujours autres que ce que nous pouvons imaginer ou concevoir ; autres puisque liés à l'Autre. Non pas que par nous-mêmes nous puissions nous lier à Dieu mais puisque, nous le croyons, l'Autre s'est lié à nous et d'un lien indestructible : en prenant chair de notre chair. Il a alors réalisé ce qu'heureusement nous ne pouvions pas faire par nous-mêmes ! Son nom est Jésus, qui signifie « Dieu sauve ».
Ce lien charnel, cette alliance, en christianisme s'appelle la foi. Elle s'éprouve dans la chair des croyants. Nous faisons l'expérience que cet appel à l'Autre nous déprend de nous- mêmes et nous libère. Nous découvrons que ce qui s'est passé un jour en Jésus dans un temps et un lieu précis de l'histoire « marche » pour nous aujourd'hui : le Verbe prend chair de notre propre chair. Nous en avons le signe lorsque nous trouvons, en vérité, notre joie en l'Autre et dans les autres. Là seulement nous ne risquons plus de prendre le malheur pour le bonheur ni Dieu pour le démon. Nous sommes alors remplis de reconnaissance pour Dieu qui se donne ainsi et dont la force passe par nous et nous dépasse.
Nous savons d'expérience qu'il s'agit là d'une histoire de vie ou de mort. Et nous choisissons la vie ! Alors, nous ne luttons plus contre Dieu, comme les habitants de Babel, mais, par grâce, avec Lui. La foi se fait nécessairement agissante et c'est la « charité » : « Montre-moi ta foi qui n'agit pas, dit l'épître de saint Jacques, moi ce sont mes actes qui te montreront ma foi. » Mais une charité qui n'a rien à voir avec celle dont on se passerait bien quand on s'en trouve soi-même le débiteur et qu'on aurait envie de dire : « S'il te plaît aie la charité de ne pas me faire la charité ! » Pas cette fausse charité qui tend à dire « il faut être gentil avec tout le monde » pour se protéger soi-même et n'avoir à recevoir les coups de personne ! Quand la foi agit en charité, elle est forte de la force même de Dieu qui n'a pas hésité à blesser l'humanité pour l'ouvrir et qui en a été blessé Lui-même jusqu'à en mourir pour la ressusciter !
Cette foi qui jaillit en charité s'éprouve en notre chair et il est des heures où notre expérience défaille ! Nous entrons alors dans un combat : le combat de la foi. Ce combat, cependant, ne consiste plus à tenter de se reprendre soi-même en mains mais d'en appeler à l'Autre ou aux autres pour nous en sortir. À l'Autre qui s'est fait l'un de nous - Jésus-Christ - dont nous espérons qu'Il fera pour nous l'impossible. Aux autres qui, dans le passé ou aujourd'hui, témoignent que par Jésus-Christ, l'impossible pour eux s'est produit.
Des témoins de la foi
Le mot « Église » prend racine dans un verbe qui signifie « appeler ». Il désigne tous ceux qui en appellent à d’autres croyants pour les aider à tenir dans la foi quand chez eux elle défaille. Il désigne tous ceux qui acceptent de s’aider mutuellement à croire que, grâce à Dieu, la vie sera plus forte que la mort. Si la foi est toujours une expérience personnelle et intime, elle ne peut jamais se réduire à n’être que cela. Nous avons besoin du témoignage les uns des autres. Nous avons besoin du témoignage des premiers disciples, des évangiles, des écrits de saint Paul, des Actes des Apôtres… S’il n’y a pas une unité entre ce que nous croyons quand nous parlons de résurrection et ce qu’ils entendent par résurrection, tout s’effondre.
Cette nécessité de passer par d’autres n’est pas le signe d’une déficience. C’est la marque même du christianisme. Depuis qu’en Jésus-Christ, Dieu a épousé notre humanité, il s’est lié pour toujours à elle : il veut passer par des hommes et des femmes qui s’entraideront à espérer contre toute espérance que la Vie sera plus forte que la mort. S’aider mutuellement à croire au Dieu de Jésus-Christ revient à nous entretenir dans la foi et de la foi qui nous anime. Il y a bien une langue de Dieu que sont appelés à pratiquer tous les croyants. Mais, bien loin d’uniformiser les expressions particulières de la foi, la langue de Dieu fait toujours place au mystère de l’Autre. Elle n’est ni bavarde ni donneuse de leçons. Elle se fait silence par respect du mystère des autres, en particulier de ceux que l’on serait porté à ne pas écouter : le malade, le prisonnier, le délinquant, l’étranger. La langue de Dieu est une voix de fin silence, une brise légère… rien qu’un souffle, un accent… L’Église, en ce sens, n’est pas un lieu qui définirait l’identité de ceux qui seraient dedans par opposition à d’autres qui seraient dehors car le vent se moque des frontières. Toute institutionnalisation ne sera jamais qu’une retombée de la foi qui appellera toujours à son dépassement. Quand on demande à Michel de Certeau comment il définirait son appartenance à l’Église, il répond : « Il s’agit moins de vivre une appartenance que d’apprendre à vivre en dépassant l’appartenance. C’est bien précisément ce qu’indique la différence entre le ‘lieu’ et le ‘chemin’ » (2).
« Abraham partit sans savoir où il allait et c’est parce qu’il ne savait pas où il allait qu’il savait qu’il était dans la vérité » (Saint Grégoire de Nysse). L’Église, dans ce sens, est composée de tous ceux qui sont en partance parce qu’ils croient à l’impossible : ils croient qu’il est bon d’aventurer sa vie en s’appuyant sur la Parole de Dieu. Jésus n’a-t-il pas dit : « Je suis le Chemin, la Vérité, la Vie » ?
Être en partance, signifie pour certains vivre sur les marges de l’Église dont l’institution trace les frontières, là où l’on peut exprimer une appartenance sans jamais s’y laisser enfermer. D’autres peuvent préférer être dehors. D’autres encore préféreront vivre à l’intérieur des cadres fixés par le Magistère. Mais, pour être en partance, ils auront toujours à écouter et à se laisser déplacer par ceux qui vivent dans la foi autrement qu’eux.
Ceux qui n’aiment pas du tout l’aventure – mais peut-on les appeler des croyants ? – par peur de se perdre auront tendance à resserrer les rangs. Il est vrai qu’ils peuvent se dire : Mais où ça va tout cela ? » Les autres ne pourront que leur répondre : « Peu importe où ça va si c’est avec Dieu qu’on y va ! » Et humblement, pauvrement, ils accepteront de n’être pas sûrs d’avoir pris la bonne direction. Ils rechercheront l’aide d’autres croyants pour discerner le Chemin de Vie.
Sur cette route, ils croiseront d’autres personnes, en partance comme eux mais qui ne sont pas croyants ou qui appartiennent à d’autres religions. Ils ne chercheront pas à les convertir. Ils sauront garder un silence profondément respectueux du mystère de l’autre. Mais, entre eux, on ne pourra les empêcher de discerner le passage de Dieu chez tous ceux qui sont en marche les uns vers les autres. Alors ils se réjouiront de leur Dieu qui dépasse toute appartenance et ils chanteront Ses merveilles qui vraiment nous dépassent !
Christine Fontaine, 15 décembre 2020
Peintures de Edvard Munch
1- Cf. 1 Rois 19, 12. / Retour au texte
2- in Culture et foi n° 43-44 – Comme des nomades / Retour au texte